verse.fr - Passerat, Jean : Sur la Journée de Senlis





Passerat, Jean (1534 - 1602)

Sur la Journée de Senlis

A chacun nature donne
Des pieds, pour le secourir :
Les pieds sauvent la personne ;
Il n'est que de bien courir.

Ce vaillant Prince d'Aumale,
Pour avoir fort bien couru,
Quoiqu'il ait perdu sa male,
N'a pas la mort encouru.

Quand ouvert est la barriere,
De peur de blasme encourir,
Ne demeurez point derriere :
Il n'est que de bien courir.

Courir vaut un diadesme :
Les coureurs sont gens de bien :
Tremont, & Balagny mesme,
Et Congy, le scavent bien.

Bien courir n'est pas un vice ;
On court pour gagner le prix :
C'est un honneste exercice ;
Bon coureur n'est jamais pris.

Souvent celui qui demeure
Est cause de son méchef :
Celui qui fuit de bonne heure,
Peut combattre de rechef.

Il vaut mieux des pieds combattre,
En fendant l'air et le vent,
Que se faire occire ou battre,
Pour n'avoir pris le devant.

Qui a de l'honneur envie,
Ne doit pourtant en mourir :
Où il y a de la vie,
Il n'est que de bien courir.


"Le Duc d'Aumale, qui perdit la bataille de Senlis, [...] se sauva par la fuite."